

Collection Du Crest
Le peintre Eugène Martin
Parmi les nombreux artistes, dont les œuvres composent la Collection du Crest, certains souffrent aujourd’hui d’un grand manque de reconnaissance, alors que de leur vivant ils étaient portés aux nues et jouissaient d’une réputation qui dépassait largement les frontières de la Suisse romande. C’est le cas notamment d’Eugène Martin (1880-1954).
Martin voit le jour à Genève en 1880. Après y avoir effectué sa scolarité obligatoire, il fait un apprentissage d’agent de change dans une banque, comme son père avant lui. Il développe cependant très tôt un fort goût pour le dessin et la peinture ; sa première aquarelle qui nous est parvenue, une vue du château de Chillon exécutée d’après une carte postale, date ainsi de 1895. Levé aux aurores chaque matin, il s’en va dessiner sur le motif, le plus souvent au Jardin anglais, avant de se rendre au bureau dès 8h30. Âgé de vingt-cinq ans, il traverse la Manche et gagne l’Angleterre où un séjour linguistique l’occupe durant six mois ; s’il y apprend la langue de Shakespeare, il commence aussi à fumer. Rares sont d’ailleurs les photographies où il n’apparaît pas, par la suite, une cigarette en bouche ou à la main. Un signe distinctif en plus du costume et de l’éternel nœud-papillon noir que porte en permanence cet homme élégant pour lequel la mode n’a pas de secrets.
En 1906, Martin quitte en effet la Banque Populaire afin de travailler aux côtés de sa mère. Cette dernière possède une maison de haute couture, située au quai du Mont-Blanc, dont le jeune Eugène prend la direction en 1912. Né gaucher, il se sert de cette main afin de couper et tailler les étoffes la semaine alors que durant son temps libre, c’est de la droite qu’il manie ses pinceaux et qu’il s’escrime sur la toile. Les quelques mois de cours du soir qu’il suit auprès d’Eugène Gilliard, à l’École des Beaux-Arts de Genève, lui permettent surtout de se former aux bases de la peinture à l’huile, qu’il pratique presque exclusivement dès 1911, mais pour l’essentiel, il s’exprime en vrai autodidacte. Celui qui était vu comme un peintre du dimanche devient, ainsi qu’aime en plaisanter Maurice Barraud, « le peintre des sept dimanches ». Très proche ami de ce dernier et d’Alexandre Blanchet, Martin se nourrit de leurs conseils et leur rend la pareille à l’occasion de leurs expositions en se chargeant des discours lors des vernissages. Doué d’une belle plume et d’un réel talent d’orateur en parallèle à sa peinture, il rédige préfaces, articles, conférences, tout en entretenant également une importante correspondance avec artistes, collectionneurs et conservateurs de musées.
À partir de 1912, Martin présente ses œuvres à la quasi-totalité des expositions nationales et de la Société des peintres, sculpteurs et architectes suisses (SPSAS), tout comme à Paris où ses toiles prennent place à deux reprises aux cimaises du Salon des Indépendants. En 1915, il figure au nombre des membres-fondateurs avec les frères Maurice et François Barraud, mais aussi Gustave Buchet et du Falot, un groupe artistique moderniste en quête de renouveau pictural.
Après avoir été simple membre de la SPSAS, il devient président de la section genevoise avant d’accéder à la tête du comité national de 1944 à 1952. Parmi ses apports essentiels à la société, il faut citer la création très avant-gardiste de la Caisse maladie et de la Caisse de secours pour les artistes.
Eugène Martin s’éteint à Genève en 1954, peu de temps après son ami Barraud. Alors que la Collection du Crest comptait déjà deux de ses œuvres, d’autres sont venues les compléter, dont deux offertes par sa petite-fille, Nicole Martin. Dans les musées suisses ses œuvres se comptent en grand nombre, aussi bien à Genève que sur l’arc lémanique ainsi qu’outre-Sarine.
Ouvert les mercredis et samedis de 10h à 17h.
(sauf jours fériés)
Prix d’entrée :
CHF 10 (plein tarif)
CHF 6 (étudiants, AVS, AI)
Gratuit (enfants jusqu’à 10 ans)
Visites guidées sur réservation :
info@collectionducrest.ch
Route du Château-du-Crest 40, 1254 Jussy (Suisse)


Collection Du Crest
Un enrichissement continu
Si les visiteurs qui viennent découvrir la Collection du Crest, à Jussy, peuvent découvrir un peu plus d’une centaine d’œuvres, ils ne se doutent pas que d’autres merveilles attendent patiemment, dans ses réserves, d’être exposées.
Au moment de son ouverture déjà, en juin 2023, la Collection du Crest comptait plus de deux cents pièces au total, essentiellement des peintures à l’huile mais également des sculptures et quelques dessins. En constante évolution, elle n’a cessé depuis de s’étoffer, tant par le biais de nouvelles acquisitions auprès de maisons de vente aux enchères ou de galeries que par celui de donations faites par des visiteurs enthousiastes et généreux.
Parmi les nouvelles acquisitions figure notamment un petit paysage du peintre français Jean-Baptiste Camille Corot. Son Souvenir de Dardagny (ill. COROT) met en scène le couple Émilie et Armand Leleux se baladant dans la campagne genevoise ; tous deux artistes, ils sont eux aussi représentés dans la collection.
Achetée à Zurich, une grande toile d’Édouard Castres, les Montreurs d’ours (ill. CASTRES), présente un groupe de saltimbanques marchant dans la neige en compagnie de trois ours dressés.
D’Émile Bressler (1886-1966), une jeune femme vêtue d’une robe bleue et d’un chapeau des années trente, assise sur un lit, pose à côté d’un grand bouquet de fleurs ; en plus de son rôle décoratif, cette peinture, adjugée à Genève, est aussi représentative de la mode de son temps, de l’évolution de l’habillement et de la coiffure (ill. BRESSLER).
Par le biais d’un galeriste parisien, une collaboration entre Firmin Massot, Jacques-Laurent Agasse et Wolfgang-Adam Toepffer a aussi rejoint la partie plus ancienne de la collection. Réalisée à trois mains, elle synthétise le meilleur du talent de chacun d’eux. Le tableau représente le baron Henry Jean de Finguerlin avec son épouse Marguérite et leur fille.
Plus récemment, une vue du Léman a intégré à son tour la Collection du Crest. Exécutée par Stéphanie Guerzoni, elle rappelle la peinture de son maître et professeur, Ferdinand Hodler, dont elle fut par ailleurs l’une des biographes (ill. GUERZONI).
Trois collectionneurs privés ont aussi souhaité apporter leur contribution au musée en faisant don d’une ou plusieurs œuvres. L’un d’eux s’est même dessaisi d’une quarantaine de toiles au profit de la Collection du Crest. Représentatives de l’école genevoise de peinture dans la première moitié du XXe siècle, elles sont pour beaucoup le fruit du travail de membres de la Palette carougeoise, tous artistes amateurs ou professionnels. Parmi eux des René Guinand, plusieurs Émile Bressler – des paysages pour l’essentiel, deux Louis Salzmann ou encore un Eugène Martin. Si certains avaient déjà leur place à Jussy, de nouveaux arrivants ont aussi fait leur entrée, comblant ainsi diverses lacunes. C’est le cas de Louis-Paul Nyauld, Alexandre de Spengler ou Pierre Jaques (ill. JAQUES) pour n’en citer que quelques-uns.
L’accrochage actuel étant voué à changer d’ici deux à trois ans aux cimaises des salles d’exposition, ces œuvres pourront alors, à leur tour, profiter au public venu en visite. Au fil du temps, d’autres viendront certainement les y rejoindre. En attendant, toutes trouveront leur place dans le catalogue de la Collection du Crest en cours de rédaction.
Ouvert les mercredis et samedis de 10h à 17h.
(sauf jours fériés)
Prix d’entrée :
CHF 10 (plein tarif)
CHF 6 (étudiants, AVS, AI)
Gratuit (enfants jusqu’à 10 ans)
Visites guidées sur réservation :
info@collectionducrest.ch
Route du Château-du-Crest 40, 1254 Jussy (Suisse)


Collection Du Crest
Un musée à la campagne
Ouverte au public en juin 2023, la Collection du Crest offre
l’occasion de découvrir un ensemble unique de peintures et
de sculptures exécutées par des artistes de l’École genevoise
entre les XVIIe et XXe siècles.
Lorsque Jean-Louis Micheli rapporte chez lui, pour Noël
1946, un « Bois de Jussy » par le peintre Alexandre Calame,
son jeune fils Yves – alors âgé de dix ans à peine – ne
s’imagine pas encore l’impact qu’aura cette œuvre. Très vite,
il ressent l’envie de réunir des œuvres d’artistes genevois
et commence à en couvrir les murs du château familial. Il
déniche de véritables trésors auprès de maisons de ventes
aux enchères, de galeries ou même de collectionneurs
privés et rapidement, il commence à manquer de place.
Cette passion pour l’art l’entraîne ainsi, quelque soixante
ans plus tard, à créer un espace destiné à présenter plus
d’une centaine de peintures et de sculptures au sein d’un
musée aménagé par le bureau Charles Pictet & Baptiste
Broillet, architectes associés, donnant ainsi naissance à la
Collection du Crest.
De la main de maîtres aussi renommés que Jean-Etienne
Liotard, Jacques-Laurent Agasse, Ferdinand Hodler ou
Édouard Vallet, certaines œuvres voient aussi le jour dans
des ateliers d’artistes moins réputés mais de grand talent
également. Le dénominateur commun à cette grande
diversité de créateurs est leur contribution à l’essor de l’art
genevois et suisse, ainsi qu’à son rayonnement international
pour certains. Chacun entretient par ailleurs une relation
privilégiée avec la Cité de Calvin, qu’il y soit né, qu’il y ait
étudié ou passé une partie importante de sa carrière.
Présentée de façon chronologique, la collection retrace
l’histoire de l’art à Genève depuis le XVIIIe siècle jusqu’au
milieu du XXe siècle et s’articule essentiellement autour
du lac et des montagnes environnantes. Des vues de la
campagne genevoise ou du Léman – les plus nombreuses
– côtoient des scènes du Valais. La collection réunit aussi
un ensemble de scènes de genre, de figures et de nus, mais
aussi des natures mortes – parmi lesquelles un remarquable
Alice Bailly – ainsi que quelques sujets historiques.
Route du Château du Crest 40 – 1254 Jussy